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في سبيل العروبة الحضارية - Sur le chemin de l'arabité civilisationnelle
10 janvier 2022

Comprendre le hadith, selon 'Ali Merad

Livres arabes


"Le terme arabe hadîth (au sens de "propos", "récit"), désigne l'ensemble des paroles attribuées au Prophète, et que les générations musulmanes (celle des Compagnons, d'abord, puis celles de leurs successeurs) se sont transmises oralement, jusqu'au milieu du IIè siècle de l'Hégire (milieu du IXè siècle), époque à laquelle commence la collecte systématique de ces paroles. Les recueils ainsi établis, généralement selon un ordre thématique, forment ce que l'on appelle la Tradition du Prophète, et constituent, à côté de la source coranique, une référence canonique indispensable à la constitution de la doctrine juridique, éthique et théologique de l'Islam.
En raison de son importance comme source de la loi religieuse (incluant les normes éthiques et juridiques aussi bien que les prescriptions fondamentales du culte), la valeur du Hadîth est fonction de son authenticité. C'est pourquoi les docteurs de l'Islam se sont attachés de bonne heure à faire une critique aussi rigoureuse que possible des traditions attribuées à Mohammad. Au terme de minutieuses enquêtes orales, et de laborieuses évaluations théoriques, les traditions (ou "hadîth-s") ont pu être classées en plusieurs catégories, selon des critères d'authenticité portant à la fois sur le contenu même du hadîth, sur la crédibilité de ses transmetteurs, et sur la validité des chaînes de transmission, au regard de la vérité historique.
Ainsi, les meilleures traditions sont celles qui correspondent aux hadîth-s dits "vrais" ou "sains" (sahîh), ceux qui présentent toutes les garanties d'authenticité, notamment par la rigoureuse continuité attestée dans leurs chaînes de transmetteurs, et l'inattaquable véracité de ces derniers. Viennent ensuite les hadîth-s dits "bons", dont le contenu est satisfaisants pour l'esprit, et qui peuvent être tenus pour vraisemblables, sinon rigoureusement authentiques; puis les hadîth-s "étranges", qui posent des problèmes insolubles quant à la validité de leur chaîne de transmission; enfin, les hadîth-s dits "faibles", donc irrecevables : ce sont les hadîth-s dont l'authenticité est franchement discutable, en raison de l'incertitude - ou de la suspicion - qui planent sur la personnalité de l'un ou de plusieurs personnages composant la chaîne des transmetteurs.
Ce long travail de critique de la tradition du Prophète a conduit les Musulmans à reconnaître pour authentiques un certain nombre de recueils, au premier rang desquels il faut citer celui de Boukhârî (194-256 H. /810-870), et celui de Mouslim (202-261 H. /8I7-875), qui sont universellement reçus comme source canonique seconde, à côté de la source révélée.
En vertu d'un large consensus des docteurs, entériné par la pratique multiséculaire au sein de la Communauté musulmane, le statut du Hadîth est celui d'une source complémentaire du donné révélé. Mais non pas simplement au sens de tradition explicative. Le Hadîth est considéré, de plein droit, comme une tradition constitutive, car les normes édictées par le Prophète sont assimilées aux normes établies par la Révélation : elles ont la même autorité, parce qu'elles sont de même essence (Révélation, dans un cas; inspiration divine, dans l'autre).
Dans la tradition culturelle de l'Islam, l'étude du Hadîth (par la mémorisation, la méditation et le commentaire), fait partie des disciplines religieuses majeures, au même titre que l'étude du Coran (laquelle requiert également la mémorisation, la méditation, et la pratique des commentaires). Mais les récents progrès des études historiques, et le libéralisme qui s'est fait jour dans le monde musulman, depuis le début du siècle, ont conduit bien des auteurs à s'interroger sur la validité de la Tradition du Prophète, du moins telle qu'elle se trouve établie par les Ecoles classiques. Bien que les premières tentatives de relativisation du Hadîth remontent à la première décennie de notre siècle, c'est seulement depuis les années 50 que de sérieux progrès ont été enregistré dans le sens d'une critique plus rigoureuse de cette Tradition, tant du point de vue de son contenu, que du point de vue des conditions matérielles de sa transmission.
Ceci étant, il n'en demeure pas moins vrai que le Hadîth continue d'être entouré d'une profonde vénération en pays d'Islam. Et si le caractère canonique de la Tradition prophétique - en tant que source législative - paraît aujourd'hui sérieusement remis en question, les Musulmans n'en continuent pas moins de considérer le Hadîth comme une référence privilégiée pour connaître la personnalité et la pensée religieuse du Prophète, et par là même, pour mieux apprécier le message islamique originel.

En outre, comme le Coran fait en quelque sorte obligation aux croyants d'imiter le Prophète ("Vous avez en l'Envoyé de Dieu un excellent modèle" : 23, 2I), cette imitation passe nécessairement par une connaissance intime de la riche littérature du Hadîth. C'est à ce prix seulement que l'on peut parvenir à se faire une idée précise de la conduite historique du Prophète, et une image aussi claire que possible de sa voie morale et spirituelle."

 

'Ali Merad fut l'un des grands savants de l'islam au 20ème siècle. Docteur ès Lettre, cet algérien a été professeur à l'Université de Lyon III. Parmis ses ouvrages, citons : Le Réformisme musulman en Algérie de 1925 à 1940. Essai d'Histoire religieuse et sociale, Paris-La Haye, Mouton et Cie, 1967, in-8, 472 p. ; Ibn Badis, Commentateur du Coran, Paris, P. Geuthner, 1971, in-4, 267 p.

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Ce site, animé par le Collectif Algérie-Machreq, est consacré à la mémoire historique de la Nation arabo-musulmane, à l'intellectualité, la spiritualité, la culture, l'expérience révolutionnaire des peuples arabes. La Palestine sera à l'honneur. 


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