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في سبيل العروبة الحضارية - Sur le chemin de l'arabité civilisationnelle
11 avril 2022

Biographie de l’Emir 'Abd el-Qader, par le Dr Cheikh Bouamrane

Emir 4

L’Emir Abd el-Kader Ben Mohieddine est une figure illustre de notre histoire contemporaine. Il est le symbole de notre résistance acharnée contre une armée française qui était l’une des plus grandes d’Europe. Son nom est célèbre et sa mémoire honorée en général dans notre pays comme à l’extérieur. L’un des premiers chercheurs à fournir sur l’Emir une idée exacte a été Mohamed-Chérif Sahli dans un livre remarquable Abdelkader, le chevalier de la foi. Puis d’autres ouvrages ont paru, ceux des Professeurs Saadallah, Bouaziz, Zouabyri…

Aujourd’hui, les compatriotes de l’Emir le connaissent mieux, mais à notre avis encore incomplètement. Il est souhaitable que des études sérieusement documentées, accessibles au grand public, le présentent sous son vrai jour. Il est possible aussi de recourir à l’image et de produire des films historiques sur l’Emir ; cette initiative mérite d’être encouragée, même si elle se heurte à des difficultés de financement. Ainsi, l’homme et l’œuvre pourraient retrouver vraiment la place qu’ils méritent.

L’Emir Abd-el-Kader demeure le symbole de la résistance nationale à l’occupation coloniale de notre pays. Pendant quinze ans (1832-1847), il a lutté obstinément contre l’une des meilleures armées d’Europe, supérieure en nombre et en matériel. Comme l’indiquent plus d’un de ses biographes, il a su imposer le respect et l’admiration à ses amis comme à ses adversaires.

 

Abd-el-Kader est né à la Guetna, près de Mascara, en 1808.

 

Élevé dans la zâouïa paternelle, dirigée par Si Mohieddine, il reçoit une éducation solide qu’il complète auprès de maîtres éminents à Arzew et à Oran. Il apprend les sciences religieuses, la littérature arabe, l’histoire, la philosophie, les mathématiques, l’astronomie, la médecine. Platon, Aristote, Al-Ghazâli, Ibn Rochd et Ibn Khaldoûn lui sont familiers, comme en témoignent ses écrits. Toute sa vie, il étudie et développe sa culture.

 

Il effectue le pèlerinage à la Mecque avec son père en 1826 et prend contact avec l’Orient. Les pèlerins se rendent ensuite à Baghdad pour visiter le tombeau de Sidi Abdelkader Jilânî, fondateur de la confrérie al-qâdiriyya à laquelle se rattache la zâouïa de la Guetna. Ils échappent ainsi aux menaces du bey d’Oran qui a pris ombrage de l’autorité spirituelle de Sidi Mohieddine et de son fils en Oranie.

 

L’engagement et la guerre Après la prise d’Alger en 1830, Sidi Mohieddine et le jeune Abd-el-Kader participent à la résistance populaire ; Abd-el-Kader se distingue par son courage et son intelligence. Les tribus de l’Ouest se réunissent et veulent choisir un chef pour défendre le pays. Sidi Mohieddine, sollicité, s’excuse en raison de son âge et propose son fils. Abd-el-Kader fait l’unanimité ; il est investi en qualité d’Émir par une grande assemblée réunie près de Mascara, le 27 novembre 1832. Il s’engage à diriger la guerre contre l’occupation étrangère, organise l’Etat national, constitue le gouvernement, désigne les Khalifas pour administrer les provinces, mobilise les combattants, constitue une armée régulière, lève les impôts, rend la justice. Il signe le traité Desmichels avec le général d’Oran, le 26 février 1834 ; ce traité reconnaît son autorité sur l’Ouest et le Chélif. Ratifié par le gouvernement français, il est mal appliqué par le général Trézel, successeur de Desmichels. Ce général défie l’Emir et veut réduire son autorité. L’Emir lui inflige une grave défaite au Macta , sur la route de Mostaganem, le 28 juin 1835. Plusieurs engagements opposent l’Emir aux troupes françaises. L’Emir pratique la guérilla permanente, attaque rarement l’ennemi de front ; il le harcèle, lui tend des embuscades et lui cause des pertes sensibles. Il est insaisissable, se montre partout et nulle part ; son infanterie et sa cavalerie sont mobiles et efficaces.

 

Bugeaud et l’Emir

Le général Bugeaud, nommé à Oran, négocie un nouveau traité avec l’Emir ; le traité de la Tafna est signé le 30 mai 1837. L’Emir contrôle désormais l’Ouest, le Titteri et une partie de l’Algérois. Il consolide l’État, bâtit des villes fortifiées, fonde des ateliers militaires, soumet les rebelles et les collaborateurs. Le traité donne lieu à des contestations avec le gouverneur Valée et la guerre reprend en novembre 1839. Bugeaud, nommé gouverneur, veut occuper tout le pays ; il pratique la méthode de la terre brûlée, détruisant tout : les villes, les récoltes, les troupeaux. L’Emir résiste avec énergie, remporte de brillants succès comme celui de Sidi-Brahim (23 septembre 1845). Mais le pays est ruiné ; les tribus sont épuisées ; le soutien du Maroc fait défaut…L’Emir décide d’arrêter la guerre et choisit l’exil (décembre 1847). Le gouvernement français accepte de le transporter en Orient.

 

La prison et l’exil

L’engagement français n’est pas respecté. L’Emir est conduit à Toulon, puis à Pau et Amboise. Il est considéré comme prisonnier d’État jusqu’à octobre 1852, date à laquelle Napoléon III vient enfin le libérer. Il s’embarque pour la Turquie et s’installe à Brousse, puis se fixe définitivement à Damas où il reçoit un accueil triomphal. En dehors de quelques voyages et d’un nouveau pèlerinage, il ne quitte plus la Syrie et consacre son temps à la méditation, à la prière, à l’enseignement et aux œuvres de bienfaisance.

En 1860, les émeutes de Damas lui fournissent l’occasion des s’illustrer comme un personnage hors série. Il sauve des milliers de chrétiens du massacre et fait reculer les émeutiers. Plusieurs chefs d’État lui adressent des félicitations et des décorations, notamment ceux d’Angleterre, de Russie, de France…Célèbre et honoré, il s’éteint à Damas le 26 mai 1883. Une foule considérable assiste à ses funérailles.

 

L’œuvre écrite

L’Emir a beaucoup écrit. On peut citer notamment :

1- Dhikrâ al-âqil, édit. M. Haqqi, Beyrouth, 1966 ; traduit en 1858, puis de nouveau en 1977 ; cette seconde traduction de R. Khawam porte le titre de Lettre aux Français.

L’Emir y fait preuve d’une grande culture.

2- Al-miqrâdh al-hâdd, éd. De Damas, s.d. Il s’agit d’une réfutation de ceux qui s’attaquent à l’Islâm.

3- Sîrat al-Amir, édition critique par Dr Yahia Bouaziz, édit. Dar-al-Gharb al-islâmî, Beyrouth, 1995.

4- Al-mawâqif, édit. de Damas, 1966 et d’Alger, Enag, 1996,

3 vol., extraits traduits par M. Chodkiewicz.

5- Wachâh al-Katâïb, traduit en 1844.

6- Diwân, édit. Dâr-al Oumma, Alger, 2001.

7- La correspondance, dispersée dans plusieurs ouvrages ou dans les bibliothèques qu’il faudrait rassembler et éditer.

 

 

Bibliographie selective

- Abd-el-Kader (l’Emir), Règlements militaires, trad. F. Patorni, édit. Fontana, Alger, 1899.

- Lettre aux Français, trad. R. Khawam, édit Phébus, Paris, 1977.

- Ecrits spirituels, introduction, traduction et notes par M. Chodkievickz, édit du Seuil, Paris, 1982.

 

 

- Abd-el-Halim M., Al-Mohâsibi, édit. Geuthner, Paris, 1940.

- Aouli S., Redjala R., Zoummerof Ph., Abd-el-Kader, édit. Fayard, Paris, 1984.

- Ibn Arabi, La sagesse des prophètes, édit. A. Michel, Paris, 1955.

- Azan P., Abd-el-Kader, édit. Hachette, Paris, 1925. (ouvrage très documenté).

- Sidi-Brahim, édit Horizons de France, Paris, 1945.

- Bellemare A., Abd-el-Kader, sa vie politique et militaire, édit. Hachette, Paris, 1854.

- Berbrugger(A.), Voyage au camp d’Abd-el-Kader, Revue des deux mondes, Paris, août 1938.

- Bessaih (B.), De l’Emir Abdelkader à l’Imâm Chamyl, édit. Dahlab, Alger, 1996.

- Boutaleb (A.) , L’Emir Abdelkader et la formation de la nation algérienne, édit. Dahlab, Alger, 1990. Utile mise au point.

- Canard (M.), Shamyl, in Annales de l’Institut d’Etudes Orientales (A.I.E.O), Faculté des Lettres d’Alger, t.XIV, 1956.

- Churchill (Ch.H.), La vie d’Abdelkader, trad.M. Habart, édit. Sned, Alger, 1971.

- Civry (de), Napoléon III et Abd-el-Kader, Paris, 1853.

- Damrémont (Gl.), Correspondance publiée par G. Yver, édit. Champion, Paris, 1927

- Daumas (E.), Correspondance, par G.Yver, édit. Soubirou, Alger, 1912. Mœurs et coutumes de l’Algérie, édit Sindbad, Paris, 1988.

- Dermenghem (E.), Vies des saints musulmans, édit. Sindbad, Paris, 1981.

- Drouet d’Erlon (GL.), Correspondance, par G.Esquer, édit. Champion, Paris, 1926.

- Duc d’Orléans (Le), Campagnes de l’armée d’Afrique, édit. Calmann-Lévy, Paris, 1890.

- Emerit ( M.)et Pérès (H.), Le texte arabe du Traité de la Tafna, Revue africaine, Alger, 1950

- Estailleur- Chanteraine (Ph.d’), L’Emir magnanime, Abd-el-Kader le croyant, édit. Fayard, Paris, 1959.

- Hamet (I.), Le gouvernement marocain et la conquêted’Alger, Paris, 1925 ; réed. Guerfi, Alger, 1997.

- Julien (Ch. A.), Histoire de l’Algérie contemporaine, t. I , édit. P.U.F., Paris, 1964

- Le Gras (J.), Abd-el-Kader, édit. Berger Levrault, Paris, 1929

- Mohammad (Emir), Tuhfat-al-zaïr, 2 t., édit. d’Alexandrie, 1903.

- Molé (M.), Les mystiques musulmans, édit. P.U.F., Paris, 1965

- Roches (L.), Trente deux ans à travers l’Islâm, 2 vol., édit. F. Didot, Paris, 1884-1885 ; réédition récente.

- Sahli (M.Ch.), Abdelkader, le chevalier de la foi, Alger, 1953; réedit. Enap, Alger 1967.

L’Emir Abdelkader, Mythes français et réalités algériennes, édit. Enap, Alger, 1988.

- Témimi(A.), Lettres inédites de l’Emir Abd-el-Kader, Tunis, 1978 .

- Veuillot (L.), Les Français en Algérie, édit. Mame, Tours, 1841 ; rééd. 1847.

- Yacono (X.), Les prisonniers de la Smala d’Abd-el-Kader, Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, 1973

 

Cet article a été publié dans la revue algérienne Les études islamiques (n° 2, décembre 2002) , revue académique bimestrielle publiée par le Haut Conseil Islamique (H.C.I) Alger. Son auteur est le Cheikh Bouamrane, professeur à l'institut de philosophie à l'université d'Alger dont il devient directeur. Il a occupé de nombreuses responsabilitésau sein de l’État algérien et de la société civile algérienne (conseiller au ministère de la Culture en 1990, ministre de la Communication et de la Culture en 1991, président de l'Union des écrivains algériens de 1995 à 1996,et président du HCI en 2001. Il est décédé le jeudi 12 mai 2016, à l'âge de 92 ans. Qu’Allah l’accueille dans Son vaste paradis

 

 

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