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في سبيل العروبة الحضارية - Sur le chemin de l'arabité civilisationnelle
6 février 2022

L'épopée méconnue de l'hôpital souterrain de l'ALN de Nebka, près de Bitam (Batna) (APS 2012)

650074

L'hôpital souterrain de l'Armée de libération nationale (ALN) de Nebka, dans la commune de Bitam, à l'ouest de Batna, figure sans conteste parmi les lieux de mémoire qui méritent de sortir de l'oubli.
Cet hôpital secret n'était pas le seul dans la vaste wilaya 1 historique Aurès-Nememcha, il est néanmoins moins connu que l'hôpital de Kimel, au c'ur du massif des Aurès, à l'est de Batna, où exercèrent les médecins de l'ALN Si Mahmoud Atsaména, Si Mahfoud Smaïne, aujourd'hui âgé de 92 ans, (au début de 1955, il était jeune anesthésiste dans un hôpital d'Alger qu'il déserta pour rejoindre le maquis), le chahid Abdesselem Ben Badis, (tombé au champ d'honneur en 1960, neveu de Cheikh Abdelhamid Ben Badis), des médecins formés dans les grandes facultés en France et qui n'avaient pas hésité à abandonner leur carrière pour se mettre au service de la cause de l'indépendance.
Ils étaient aidés par des infirmiers formés sur place ou familiers des remèdes traditionnels ou des rebouteux, tel feu le moudjahid Mohamed Ouamor Slimani, décédé à l'âge de 100 ans en 1990.
Un hôpital sous les dunes mouvantes
Il reste que l'hôpital de Nebka ne disposait nullement de la fortification naturelle que constituaient les sommets de Kimel et de Chelia. Il était au contraire installé sur un terrain nu, en pleine steppe, sous les dunes mouvantes de la région d'Ouled Djehayache.
Dans ce milieu désertique, peuplé de serpents et de scorpions, il était pourtant quasiment impossible de dénicher l'entrée de cet hôpital souterrain, sans être aidé par un guide connaissant parfaitement les lieux.
Pour retrouver ce lieu mythique, jamais profané par les forces coloniales qui avaient pourtant eu vent de son existence, l'APS s'est faite accompagner par deux témoins, Mohamed Agouni, 88 ans, puisatier de son état, qui a contribué à creuser les galeries de l'hôpital de Nebka, ainsi que Rezik Rezik, responsable de la mechta d'Ouled Djehayache durant la Révolution.
Pour arriver jusqu'à Nebka, il faut rouler pendant 13 km en direction de M'doukel, puis prendre une piste de 7 km pour arriver sur le lieu des galeries de l'hôpital où l'on pénètre par une petite ouverture juste assez large pour laisser passer une personne.
On descend tout de suite un escalier taillé à même le sol qui donne sur un couloir et des box dans lesquels sont aménagés des sièges dans le calcaire, le tout est équipé d'un système d'aération ingénieux.
Cheikh Agouni n'a pu y entrer qu'à grande peine, lui qui a creusé ces galeries il y a 55 ans. Sans se soucier des énormes scarabées qui ont peuplé les lieux, il replonge dans les souvenirs de cette époque héroïque. Ce vieux Moudjahid avait été contacté à l'époque par Abdelkader Bousmaha, dit El Ouahrani, responsable local des liaisons et des renseignements.
On a creusé de nuit comme des taupes
C'est lui qui lui a remis le plan des galeries qu'il a commencé à creuser avec l'aide du Moudjahid Derradji Yaakoub qui sera par la suite chargé de la surveillance de cette zone.
Le Moudjahid Mohamed Agouni, balayant des yeux ce qui reste de cet hôpital secret, ne peut retenir une larme qui reste accrochée à sa joue burinée. Il se souvient qu'il fallait creuser durant la nuit comme des taupes car la région était sillonnée par les véhicules militaires ennemis.
Agouni avait en fait creusé un grand nombre de casemates dans la région de Nebka, la plupart ont été ensevelies et il ne reste aujourd'hui que cet hôpital réalisé en 1955-1956.
Les habitants de la région de Nebka étaient pour la plupart, des nomades vivant sous des tentes. De connivence avec l'ALN, ils avaient tous creusé des casemates sous leurs tentes pour servir de base de repli ou de caches pour les blessés, se souvient Cheikh Rezik Rezik.
Ce dernier avait lui-même creusé dans le plus grand secret 6 casemates et 2 autres hôpitaux souterrains, restés méconnus jusqu'à l'indépendance et aujourd'hui ensevelis et disparus.
Le moudjahid Mabrouk Ayoub, 72 ans, avait rejoint l'hôpital de Nekba en 1958. Il avait longtemps servi en tant qu'infirmier dans ces galeries restées toujours à l'abri des regards et que nul ne pouvait approcher.
Les bouches d'aération étaient dissimulées sous les ronces, cependant que l'entrée était masquée par un tas de sable couvrant des planches, le tout dissimulé sous des plantes que broutaient les chèvres et les dromadaires.
Des végétaux épars soigneusement plantés par le moudjahid Belkheir Driss, habitant de la dechra d'Ouled Djehayache, qui avait toute la confiance de l'ALN pour cette tâche.
Il avait l'habitude de planter sa kheïma à l'entrée même des galeries de l'hôpital, lorsqu'il s'agissait de sortir ou de faire entrer discrètement, des blessés ou des djounoud en convalescence.
Des blessés évacués à dos de mulets et de dromadaires
Le vieux Ayoub se souvient que le responsable de la région veillait constamment à ce que personne ne s'approche des environs de l'hôpital de Nekba. Quiconque s'en approchait était immédiatement chassé, la nourriture des blessées était préparée par sa famille.
Les blessés étaient transportés de nuit à dos de mulet ou de dromadaires, escortés par des fidaïne et confiés à un militant de la mechta du nom de Mohamed Bensaad qui, lui-même, s'en remettait à un autre militant, pour enfin contacter Belkheir Idriss qui était seul à connaître l'hôpital.

Le moudjahid Ayoub précise que le blessé pouvait séjourner d'une semaine à un mois dans l'hôpital. L'on veillait toujours à ce qu'il ne puisse jamais se souvenir des lieux, pour éviter toute découverte, même s'il est arrêté et interrogé par l'ennemi.
L'hôpital de Nebka est resté secret jusqu'à l'indépendance. Un civil a été soigné dans ces lieux avant d'être arrêté par les forces françaises qui se sont doutées de l'existence de cette base sanitaire secrète étant donné qu'elles savaient que cette personne n'avait jamais quitté la région de Bitam. Mais ils n'ont pu découvrir les lieux.
Aujourd'hui à Batna, l'un des souhaits les plus profonds des Moudjahidine est de voir ce lieu de mémoire protégé et restauré pour témoigner du génie de ces hommes qui ont permis à des djounoud blessés de se faire soigner au nez et à la barbe de l'armée française. "Les jeunes aussi doivent savoir, dites-leur", lâche le vieux Mohamed Agouni en remontant péniblement à la surface, agrippé à la main ferme de son ami Rezik Rezik.

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Ce site, animé par le Collectif Algérie-Machreq, est consacré à la mémoire historique de la Nation arabo-musulmane, à l'intellectualité, la spiritualité, la culture, l'expérience révolutionnaire des peuples arabes. La Palestine sera à l'honneur. 


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