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في سبيل العروبة الحضارية - Sur le chemin de l'arabité civilisationnelle
22 mai 2022

Approche académique comparative du Tamazigt et de l’Hébreu moderne, par Kamel Nasser

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Dans la mesure où les mots ont du sens, le Tamazight est bel et bien une langue, et non un dialecte. Mais dire cela n’est pas suffisant : il faut qualifier cette langue d’« artificielle », de « fabriquée ». Le Tamazight est une chimère, un « outil de com’ » qui ne possède aucune profondeur culturelle ni aucune légitimité historique. Cette langue toute récente assume une double fonction. D’une part, elle entend, par sa généralisation dans le système éducatif algérien, désarabiser la patrie : d’autre part, elle est une arme de destruction massive contre les langues berbères régionales (et leurs variantes locales) qui, elles, ont une légitimité.

En fait, la langue Tamazight est simultanément un dispositif d’hostilité à l’égard de la langue nationale arabe et les langues régionales berbères.

La fabrication du Tamazight commence dans la seconde moitié du 19ème siècle et dans les premières décennies du 20ème siècle, dans le cadre de la politique coloniale française. Étudier les langues berbères régionales afin de mieux les opposer à l’arabe et pour les dissoudre dans une « personnalité culturelle berbère » radicalement distincte de l’identité arabe. On peut citer, à titre d’exemples, le Dictionnaire Touareg-Français (dialecte de l'Ăhaggar), de Charles de Foucauld, le Manuel de Langue Kabyle (dialecte Zouaoua), de René Basset. Il semblerait que l’un des premiers linguistes à avoir affirmé l’existence d’une langue berbère unique serait Venture de Paradis, avec sa Grammaire et dictionnaire abrégés de la langue berbère, écrit bien avant le début de la colonisation. Ce processus nous conduit dans les années 1960-1980, avec les travaux de Mouloud Mammeri (avec sa première grammaire berbère écrite en « berbère » (Tajerrumt, 1976), son UAmawal, glossaire (Paris, Imedyazen, 1980). Il contribuera même à l'élaboration de l'index inverse (français/ touareg) du Dictionnaire touareg de Charles de Foucauld... Citons également, le rôle joué par l’Académie berbère, (1966) ou encore le Groupe d'Etudes Berbères de l'Université Paris VIII-Vincennes, de 1973 à 1977.

Ce qui est troublant c’est que l’histoire du Tamazight ressemble étrangement à la naissance d’une autre langue, l’hébreu moderne, celui qui est parlé au sein de l’entité sioniste.

Lorsque le sionisme se développe au 19ème siècle, il se présente comme un simple nationalisme, le nationalisme des Juifs. Ceux-ci sont considérés comme formant une Nation. Or, selon les règles du paradigme de l’État-nation, qui culmine en ce siècle, la Nation doit reposer sur une homogénéité linguistique. Mais, pour le cas des communautés juives, ce n’est pas le cas. Elles parlent une grande diversité de langues, qui sont souvent intimement liées aux langues des pays dans lesquelles elles vivent, depuis des siècles (le yiddish, le landino, le judéo-arabe, etc.). Ces langues sont les véritables langues des communautés juives. Mais le sionisme ne l’entend pas ainsi. Profondément raciste et antisémite, le sionisme va tout simplement fabriqué, artificiellement, une nouvelle langue « moderne », langue destinée à devenir la langue de la nation juive et de son futur Etat, en terre palestinienne. Tout au long du 19ème siècle et dans la première partie du 20ème siècle, des linguistes et écrivains sionistes vont atteler à la tâche. L’un des fabricants les plus importants est une Russe, Itzhak Perlman Elianov (1858-1922), né à Vilnius. Il est notamment l’auteur d’un Thesaurus de la langue hébraïque ancienne et moderne (1901).

L’une des thèses sionistes est la croyance selon laquelle il existerait une continuité historique et démographique entre les Hébreux de l’Antiquité (que la tradition arabo-musulmane nomme Banu Isra’il) et les Sionistes et Israéliens modernes. Malheureusement, trop d’Arabes tombent dans ce pièce. En réalité, l'hébreu moderne de l’entité sioniste est très différent de l’hébreu biblique de l’antiquité. Les différences sont flagrantes au niveau du vocabulaire, des structures grammaticales et la phonologie. Ainsi, comme dans un grand nombre de langues sémitiques, en hébreu antique, la phrase commence par le verbe. Mais dans l’hébreu moderne, la structure est modelée sur les langues indo-européennes, où la phrase commence habituellement par un sujet, suivi du verbe et de l’objet..

Pour comprendre ces phénomènes, il faut avoir à l’esprit la réflexion essentielle d’Edward Said. Le Palestinien Edward Said (1935-2003) fut professeur de littérature anglaise et de littérature comparée à l’Université de Columbia, à New York. Il a été membre du Conseil National Palestinien  de l'Organisation de Libération de la Palestine de 1977 à 1991. En 1977, il publie L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident. L’une de ses thèses est que la domination impérialiste occidentale sur l’Orient a été accompagnée d’une manipulation de l’histoire des peuples de la Nation arabe et de l’Asie (et en général du monde non occidental). Dans cette manipulation, on a utilisé la linguistique, l’ethnologie, les sciences religieuses, l’archéologie afin de fabriquer un Orient de pacotille, pour inventer des mémoires illusoires (du genre : « L’Algérie n’est pas arabe mais berbère », « Le Liban n’est pas arabe mais phénicien », etc.).

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Ce site, animé par le Collectif Algérie-Machreq, est consacré à la mémoire historique de la Nation arabo-musulmane, à l'intellectualité, la spiritualité, la culture, l'expérience révolutionnaire des peuples arabes. La Palestine sera à l'honneur. 


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